SENNY Edouard

Edouard Senny est né à Filot le 22 décembre 1923 et est décédé accidentellement en gare de Hamoir le 15 janvier 1980. Son père est professeur de musique au Petit Séminaire de Saint-Roch à Ferrières et organiste à Filot. Edouard Senny manifeste très tôt des dispositions pour la musique : à douze ans, il touche l’orgue à l’église de Filot et dans les paroisses voisines. Son père sera, jusqu’à la fin de ses études secondaires gréco-latines à Saint-Roch, son seul professeur de musique.

En 1941, Edouard Senny entre au conservatoire de Liège dans la classe de piano de René Delporte. En 1943, il fréquente la classe d’harmonie de Pierre Froidebise, qui l’impressionne par sa largeur de vue et sa vaste culture. En 1945, Edouard Senny quitte le Conservatoire et poursuit ses études de piano avec René Delporte et d’écriture avec Pierre Froidebise. Ses élèves fréquentent les séances du Séminaire des Arts, organisées par André Souris. Dès 1946, Senny succède à son père comme professeur de musique à Saint-Roch. C’est à cette époque qu’il compose “Trois chansons de Charles d’Orléans” pour chant et piano et “Deux Chorals” pour orgue. En 1947, le groupe dodécaphoniste de Liège est créé, dont font partie Pierre Froidebise, Edouard Senny, Célestin Deliège. Avec “Trois Coples de Toulet” pour chant et piano et “Cinq Versets du Cantique des Cantiques” pour chant, bois et piano, il inaugure une série d’œuvres dodécaphoniques. En 1948, il compose “Quatre Phrases des Illuminations de Rimbaud” pour chant et piano dédiées à Froidebise et une “Sonate” pour piano à la demande d’André Souris. Lors d’un séjour à Paris en 1949, Edouard Senny rencontre Pierre Boulez qui l’enthousiasme par sa rigueur et sa logique. En juin de cette année, il compose un quatuor à cordes, dédié à Pierre Froidebise. En 1950, il compose une “Messe” pour soli, chœur et orchestre à vent, puis “Trois Haï-Kaï” pour voix et instruments. De 1957 à 1960, il collabore à diverses revues où il expose les principes de sa pédagogie, sans oublier les maîtres qui l’ont influencé : Souris et Webern. Il fait également de la critique musicale dans un style volontiers caustique et plein d’humour. En 1960, il est nommé professeur de musique à l’École Normale de Malonne, poste qu’il occupera jusqu’à son décès. Il recueille des “Chansons Traditionnelles de l’Ardenne Septentrionale” et des danses qu’il harmonise avec goût, science et humour pour des sociétés folkloriques locales. Dès 1965, à Saint-Roch, à Malonne comme à Filot, il est confronté en tant que chef de chœur, aux problèmes pratiques d’une liturgie qui veut se renouveler. C’est de cette époque que datent un “Ordinaire de Messe” pour une voix et orgue, deux “Messes” à quatre voix mixtes, une “Messe des Morts” pour quatre voix et orgue, compositions liturgiques nées de la nécessité et des impératifs pratiques des paroisses. En 1967, il harmonise “Douze Noëls français” puis il compose une “Louange Pascale”, un “Office du Jeudi-Saint”. Suivront “Vingt Psaumes” et “Douze Negro-Spirituals”. Bientôt prend forme le projet d’une cantate populaire sacrée en latin, français et wallon. Dans cette œuvre intitulée “Jésus”, le texte de l’Évangile sert de lien aux diverses interventions musicales et l’unité est sauvegardée par un climat modal constant sans exclure des audaces harmoniques. En 1971, il compose un “Requiem”, œuvre vocale a cappella et reçoit en 1973 une bourse du Gouvernement pour la composition de la “Lyre à double tranchant” sur des textes d’André Souris. Dans cette œuvre, il renoue avec le dodécaphonisme mais sous une forme sereine et audible. En 1976, il est nommé professeur d’analyse musicale à l’IMEP à Namur. Senny a également composé pour l’orgue. À l’occasion du 900ème anniversaire de la Cathédrale de Bayeux, il écrit “Plain-Chant pour une Cathédrale” et “Pastorale de Fête” pour trompette et orgue. Pour l’orgue Cavaillé-Coll de Saint-Ouen à Rouen, il compose “Vitrail pour Jeanne d’Arc”, hommage à la musique et au chant populaire français. Cette partition évocatrice et puissante sera sa dernière œuvre. Pendant ces dernières années, il écrit encore des pièces pour piano, une “Messe en wallon” très originale, le “Voyage de Hollande” pour chant et piano sur des textes d’Aragon et la “Lanterne Magique” sur des poèmes de Maurice Carême.

Senny a très tôt renoncé à une carrière de soliste, incompatible avec sa vie de famille et s’est destiné totalement à l’enseignement. Riche de sa culture paysanne et d’un acquis intellectuel raffiné, pratiquant dès son enfance le wallon encore vivace, nourri de littérature française, formé au chant grégorien et confronté aux recherches les plus contemporaines, il était un homme de synthèse et a su allier la rigueur et l’humour, le dépouillement et la richesse de l’inspiration.

Philippe Bayard
(D’après Léon Pâques, in : “La Nouvelle Biographie Nationale, 1994)

 

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